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  • Henri Michaux

    Mon Roi → traduzione in Russo

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Mon Roi

. . Dans ma nuit, j'assiège mon Roi, je me lève progressivement et je lui tords le cou.
 
. . Il reprend des forces, je reviens sur lui, et lui tords le cou une fois de plus.
 
. . Je le secoue, et le secoue comme un vieux prunier, et sa couronne tremble sur sa tête.
 
. . Et pourtant, c'est mon Roi, je le sais et il le sait, et c'est bien sûr que je suis à son service.
 
. . Cependant dans la nuit, la passion de mes mains l'étrangle sans répit. Point de lâcheté pourtant, j'arrive les mains nues et je serre son cou de Roi.
 
. . Et c'est mon Roi, que j'étrangle vainement depuis si longtemps dans le secret de ma petite chambre; sa face d'abord bleuie, après peu de temps redevient naturelle, et sa tête se relève, chaque nuit, chaque nuit.
 
. . Dans le secret de ma petite chambre, je pète à la figure de mon Roi. Ensuite j'éclate de rire. Il essaie de montrer un front serein, et lavé de toute injure. Mais je lui pète sans discontinuer à la figure, sauf pour me retourner vers lui, et éclater de rire à sa noble face, qui essaie de garder de la majesté.
 
. . C'est ainsi que je me conduis avec lui; commencement sans fin de ma vie obscure.
 
. . Et maintenant je le renverse par terre, et m'assieds sur sa figure. Son auguste figure disparaît; mon pantalon rude aux taches d'huile, et mon derrière — puisque enfin c'est son nom — se tiennent sans embarras sur cette face faite pour régner.
 
. . Et je ne me gêne pas, ah non, pour me tourner à gauche et à droite, quand il me plaît et plus même, sans m'occuper de ses yeux ou de son nez qui pourraient être dans le chemin. Je ne m'en vais qu'une fois lassé d'être assis.
 
. . Et si je me retourne, sa face imperturbable règne, toujours.
 
. . Je le gifle, je le gifle, je le mouche ensuite par dérision comme un enfant.
 
. . Cependant il est bien évident que c'est lui le Roi, et moi son sujet, son unique sujet.
 
. . À coups de pied dans le cul, je le chasse de ma chambre. Je le couvre de déchets de cuisine et d'ordures. Je lui casse la vaisselle dans les jambes. Je lui bourre les oreilles de basses et pertinentes injures, pour bien l'atteindre à la fois profondément et honteusement, de calomnies à la Napolitaine particulièrement crasseuses et circonstanciées, et dont le seul énoncé est une souillure dont on ne peut plus se défaire, habit ignoble fait sur mesure : le purin vraiment de l'existence.
 
. . Eh bien, il me faut recommencer le lendemain.
 
. . Il est revenu; il est là. Il est toujours là. Il ne peut pas déguerpir pour de bon. Il doit absolument m'imposer sa maudite présence royale dans ma chambre déjà si petite.
 
*
 
. . Il m'arrive trop souvent d'être impliqué dans des procès. Je fais des dettes, je me bats au couteau, je fais violence à des enfants, je n'y peux rien, je n'arrive pas à me pénétrer de l'esprit des Lois.
 
. . Quand l'adversaire a exposé ses griefs au tribunal, mon Roi écoutant à peine mes raisons reprend la plaidoirie de l'adversaire qui devient dans sa bouche auguste le réquisitoire, le préliminaire terrible du jugement qui va me tomber dessus.
 
. . À la fin seulement, il apporte quelques restrictions futiles.
 
. . L'adversaire, jugeant que c'est peu de chose, préfère retirer ces quelques griefs subsidiaires que le tribunal ne retient pas. Il lui suffit simplement d'être assuré du reste.
 
. . C'est à ce moment que mon Roi reprend l'argumentation depuis le début, toujours comme s'il la faisait sienne, mais en la rognant encore légèrement. Cela fait, et l'accord établi sur ces points de détail, il reprend encore l'argumentation, depuis le début, et, l'affaiblissant ainsi petit à petit, d'échelon en échelon, de reprise en reprise, il la réduit à de telles billevesées, que le tribunal honteux et les magistrats au grand complet se demandent comment on a osé les convoquer pour de pareilles vétilles, et un jugement négatif est rendu au milieu de l'hilarité et des quolibets de l'assistance.
 
. . Alors mon Roi, sans plus s'occuper de moi que si je n'étais pas en question, se lève et s'en va, impénétrable. On peut se demander si c'est une besogne pour un Roi; c'est là pourtant qu'il montre ce qu'il est, ce tyran, qui ne peut rien, rien laisser faire sans que sa puissance d'envoûtement ne soit venue se manifester, écrasante et sans recours.
 
. . Imbécile, qui tentai de le mettre à la porte ! Que ne le laissai-je dans cette chambre tranquillement, tranquillement sans m'occuper de lui.
 
. . Mais non. Imbécile que j'ai été, et lui, voyant comme c'était simple de régner, va bientôt tyranniser un pays entier.
 
. . Partout où il va, il s'installe.
 
. . Et personne ne s'étonne, il semble que sa place était là depuis toujours.
 
. . On attend, on ne dit mot, on attend que Lui décide.
 
. . Dans ma petite chambre viennent et passent les animaux. Pas en même temps. Pas intacts. Mais ils passent, cortège mesquin et dérisoire des formes de la nature. Le lion y entre la tête basse, pochée, cabossée comme un vieux paquet de hardes. Ses pauvres pattes flottent. Il progresse on ne sait comment, mais en tout cas comme un malheureux.
 
. . L'éléphant entre dégonflé et moins solide qu'un faon.
 
. . Ainsi du reste des animaux.
 
. . Aucun appareil. Aucune machine. L'automobile y entre strictement laminée et ferait à la rigueur un parquet.
 
. . Telle est ma petite chambre où mon inflexible Roi ne veut rien, rien qu'il n'ait malmené, confondu, réduit à rien, où moi cependant j'ai appelé tant d'êtres à devenir mes compagnons.
 
. . Même le rhinocéros, cette brute qui ne peut sentir l'homme, qui fonce sur tout (et si solide taillé en roc), le rhinocéros lui-même un jour, entra en brouillard presque impalpable, évasif et sans résistance... et flotta.
 
. . Cent fois plus fort que lui était le petit rideau de la lucarne, cent fois plus, que lui, le fort et l'impétueux rhinocéros qui ne recule devant rien, que lui mon grand espoir.
 
. . Je lui avais sacrifié ma vie d'avance. J'étais prêt.
 
. . Mais mon Roi ne veut pas que les rhinocéros entrent autrement que faibles et dégoulinants.
 
. . Une autre fois peut-être lui permettra-t-il de circuler avec des béquilles... et, pour le circonscrire, un semblant de peau, une mince peau d'enfant qu'un grain de sable écorchera.
 
. . C'est comme cela que mon Roi autorise les animaux à passer devant nous. Comme cela seulement.
 
. . Il règne; il m'a; il ne tient pas aux distractions.
 
*
 
. . Cette petite menotte rigide dans ma poche, c'est tout ce qui me reste de ma fiancée.
 
. . Une menotte sèche et momifiée (se peut-il vraiment qu'elle fût à elle ?). C'est tout ce qu'il m'a laissé d'Elle.
 
. . Il me l'a ravie. Il me l'a perdue. Il me l'a réduite à rien !
 
*
 
. . Dans ma petite chambre, les séances du palais sont tout ce qu'il y a de plus misérable.
 
. . Même les serpents ne sont pas assez bas, ni rampants pour lui, même un pin immobile l'offusquerait.
 
. . Aussi, ce qui paraît à sa Cour (à notre pauvre petite chambre !) est-il si incroyablement décevant que le dernier des prolétaires ne saurait l'envier.
 
. . D'ailleurs qui d'autre que mon Roi, et moi qui en ai l'habitude, pourrait saisir quelque être respectueux dans ces avances et reculs de matière obscure, ces petits ébats de feuilles mortes, ces gouttes peu nombreuses qui tombent graves et désolées dans le silence.
 
. . Vains hommages, d'ailleurs !
 
. . Imperceptibles sont les mouvements de Sa face, imperceptibles.
 
Traduzione

Мой Король

. . Ночью я нападаю на своего Короля: приподнимусь понемногу и шею ему сверну.
 
. . Он оживает, но я опять подберусь и шею ему еще раз сверну.
 
. . Я трясу, я трясу его, как старую сливу,— и корона на нем дрожит мелкой дрожью.
 
. . И тем не менее он мой Король : он это знает, как знаю и я; нет никакого сомнения, что я ему принадлежу.
 
. . Однако ночью руки мои душат его без удержу. И никаких уловок : голые вытянув руки, я сжимаю его королевскую шею.
 
. . Так я душу своего Короля — тщетно и бесконечно давно, в моей укромной крохотной комнатке ; его лицо, сперва синеватое, быстро приобретает естественный цвет, и его голова поднимается : каждую ночь, каждую ночь.
 
. . В своей укромной крохотной комнатке я газы пускаю в лицо Королю. И от смеха давлюсь. Он силится выглядеть как ни в чем не бывало, будто бесчестье к нему не пристало. Но я продолжаю, без передышки, пускать ему газы под нос ; обернуться готов я лишь для того, чтобы расхохотаться ему в лицо — благороднейший лик, который тщится сохранить величественность,
 
. . Так-то я обращаюсь с ним ; таков вечный зачин моей жизни во тьме.
 
. . А затем, швырнув его на пол, я усаживаюсь на лицо его : августейший лик исчезает ; мои грубые сальные брюки, мой зад — так ведь он называется — без стеснения восседают на этом лице, призванном царствовать.
 
. . И я не церемонюсь, ничуть, если вдруг захочу оглядеться ; мне, право же, дела нет до его глаза или же носа, которые я при этом мог бы побеспокоить. Лишь когда надоест сидеть, я поднимаюсь.
 
. . А обернусь — его лицо неизменно, невозмутимо царит.
 
. . Оплеуха, еще оплеуха, а затем, в издевку, я ему, как ребенку, утираю нос.
 
. . Тем не менее нет никакого сомнения, что он Король, а я подданный, его единственный подданный.
 
. . Коленом под зад я гоню его прочь. Я опрокидываю на него горы кухонных отбросов. Я швыряю в него посуду. Я выплескиваю ушаты низкопробной, поносной брани; и, чтобы поглубже, пооскорбительней его задеть, присовокупляю чудовищную клевету на неаполитанский манер, особенно грязную и утонченную, в каждом слове которой — черная скверна, несмываемая короста: настоящее гноище существования.
 
. . И что же ? Назавтра приходится все повторять.
 
. . Он вернулся; он здесь. Он вечно здесь. Он не может убраться раз навсегда. Он непременно должен являть мне свое королевское превосходство в моей совсем уже крохотной комнатке.
 
*
 
. . Мне слишком часто приходится иметь дело с судом. Я влезаю в долги, я участвую в поножовщине, я совершаю насилие над детьми, — но что же мне делать, я никак не могу проникнуться духом Законов.
 
. . После того как истец в суде выдвинет свои претензии, мой Король, едва вслушавшись в мои доводы, подхватывает мотивировку противника; и в его августейших устах она становится обвинением, жутким перечнем, который вот-вот обрушится на меня.
 
. . И только в конце появляются мелкие, незначительные оговорки.
 
. . Противник, решая, что речь идет о пустяках, предпочитает отказаться от нескольких малосущественных претензий, которые суд из дела вычеркивает. Ему достаточно быть уверенным в прочем.
 
. . Тут-то Король мой возвращается к исходной мотивировке, по-прежнему будто бы ее поддерживая, но еще раз слегка ее урезая. После чего, как только согласие по этим частным вопросам достигнуто, он вновь возвращается к исходной мотивировке, и, таким образом, мало-помалу, пункт за пунктом и раз за разом, он сводит ее к такой безделице, что пристыженный суд и присяжные в полном составе недоумевают, как это посмели созвать их для подобного вздора; и оправдательный приговор оглашается среди всеобщей веселости и балагурства.
 
. . После чего мой Король, не взглянув на меня, как если бы я тут был ни при чем, встает и, загадочный, удаляется.
. . Возникает вопрос, пристало ли Королю такое занятие; но в нем-то он и проявляет себя — тиран, ни за что, ни за что не упускающий случая, чтобы выказать власть своих чар, беспощадную и неумолимую.
 
. . Идиот, зачем я гнал его из своей комнаты ? Не лучше ли было его оставить, спокойно, без крика, и не обращать внимания ?
 
. . Так нет же! Я был идиотом, а он, убедившись, что царствовать — дело нехитрое, скоро начнет тиранствовать над всей страной.
 
. . Где б он ни появился, везде воцаряется.
 
. . И никого это не удивляет; кажется, он находился здесь вечно.
 
. . Все ждут, все безмолвствуют, все ждут его повелений.
 
. . В моей крохотной комнатке появляются и проходят звери. Не все одновременно. Не совсем полноценные. Но проходят — жалкая, смехотворная вереница естественных форм. Лев появляется понурив голову — вздутую и помятую, как связка тряпья. Бедные лапы его подгибаются. Бог знает, как он передвигается, во всяком случае — как инвалид.
 
. . Слон появляется сморщенный, тщедушнее олененка.
 
. . Так и прочие звери.
 
. . Никаких механизмов. Никаких машин. Автомобиль появляется не иначе как в расплющенном виде, и в случае надобности мог бы выстелить пол.
 
. . Такова моя комнатка, где мой непреклонный Король ничего, ничего не упустит, только бы надругаться, сокрушить, изничтожить, тогда как я вызвал в нее столько разных существ, надеясь сделать их своими друзьями.
 
. . Даже гиппопотам, этот зверюга, который человека не терпит и на все бросается (и такой мощный, литой, как скала), даже гиппопотам возник однажды едва ощутимой дымкой — зыбкий, обвислый... и растекся в воздухе.
 
. . В сто раз сильней оказалась оконная шторка, в сто раз сильней могучего гневного гиппопотама, который не отступает ни перед чем.
 
. . Но Король мой стоит на своем упрямо :
 
. . лишь чахлых и хлипких впускает он гиппопотамов.
 
. . Однажды, быть может, он позволит ему расхаживать на костылях... и покрыться, для пущей отчетливости, призрачной кожицей, тонкой, как у ребенка, которую оцарапает даже песчинка.
 
. . Вот как по воле моего Короля звери должны проходить перед нами. Так, и не иначе.
 
. . Он царит; он мной помыкает ; он не ищет забав.
 
*
 
. . Эта окоченевшая ручонка у меня в кармане — все, что
осталось мне от невесты.
 
. . Тощая, высохшая ручонка (неужели действительно она принадлежала Ей ?). Это все, что осталось мне от Нее.
 
. . Он у меня Ее отнял. Он Ее погубил. Он Ее уничтожил.
 
*
 
. . Дворцовый совет в моей комнатке — зрелище самое что ни на есть безотрадное.
 
. . Для него даже змеи недостаточно низменны, недостаточно пресмыкаются ; даже в застывшей сосне он увидел бы вызов.
 
. . Так что все, кто является к его Двору (в нашу убогую комнатку), навевают такую чудовищную тоску, что и последний люмпен им не позавидует.
 
. . И потом кто еще, кроме нас, моего Короля и меня, привычного, смог бы разглядеть какое-то склонившееся существо в этих приливах и отливах темной материи, в этих робких причудах опавших листьев, в этих медленных каплях, которые строго и заунывно стучат в тишине ?
 
. . Тщетные, впрочем, почести !
 
. . Неразличимы движения Его лица, неразличимы.
 
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